La marque adorée

juillet 2019

Une petite étude de cas fictive qui a pour objectif de démontrer qu’il ne suffit pas de développer un joli logo ou une bonne marque.

La région – appelons-la Région modèle – ­est une agglomération intégrée dans un environnement rural avec une ville centrale de près de 25 000 habitantes et habitants. L’agglomération dans son ensemble abrite près de 60 000 personnes.

La région ose à présent de faire un pas vers l’avenir et investit dans un service collaboratif de marketing local. Elle octroie le mandat en question à une personnalité connue et appréciée dans l’économie et la politique locale. Les associations de l’économie locale (organisations de l’industrie, du commerce et de l’artisanat) tout comme les presque 20 communes présentes dans la région souscrivent à une déclaration d’engagement et elles participent à cette organisation en concluant un partenariat en vogue entre le domaine public et privé.

Le nouveau marketeur local est aussitôt chargé de la mission de trouver une marque ­attrayante à la région qui véhicule des valeurs modernes qui soient en accord avec les projets d’avenir. Il réalise cette mission en collaboration avec une agence de branding. Le visuel de la «nouvelle» région est rafraichissant et transmet l’image d’un lieu innovant, ouvert et libéral.

Bien qu’il s’agisse là d’une situation initiale fictive inventée pour le présent article, il se peut que dans le petit pays qu’est la Suisse, certains services marketing locaux aient été institutionnalisés de la sorte, ou de façon similaire. Voilà la mise en contexte.

Après la croissance vient la stagnation
Beaucoup de points relatifs au développement d’une marque sont d’ailleurs correctement exécutés dans cette étude de cas. Les investisseurs ont déjà un avis positif concernant la marque au bout d’un an, et après un peu plus de cinq années passées, la région peut déjà prétendre à un succès remarquable en termes d’établissement de sociétés et de personnes privées.

Mais après la septième année, on note généralement que cette croissance se transforme en stagnation. L’organisation perd peu à peu son appui, bien qu’elle ait toujours une excellente réputation auprès de ses investisseurs et partenaires externes.

Que s’est-il passé?
Bien qu’on ait investi dans des campagnes de motivation et dans une nouvelle marque, on a oublié de tenir compte de la position des entreprises locales et des citoyen(ne)s de proximité à l’égard des valeurs de la nouvelle marque. En effet, les valeurs fondamentales de la région étaient plutôt conservateurs. La marque s’opposait de plus en plus aux valeurs fondamentales de la région avec ses tendances ouvertes et libérales (avec un comportement correspondant du service marketing local). Pour le dire plus clairement – la région s’éloignait de plus en plus de la marque. Cela est compréhensible, car les valeurs fondamentales des citoyen(ne)s et des organisations se sont forgées et renforcées pendant plusieurs décennies. Malheureusement, cet «éloignement» s’est de plus en plus transmis sur le service marketing. Leur bonne réputation initiale a souffert.

Analogies et disparités économiques
Dans une entreprise, parallèlement au développement d’une nouvelle marque avec ses toutes nouvelles valeurs, on établit à juste titre un processus de changement. Les nouvelles valeurs sont communiquées avec force vers l’intérieur, et avec de nombreuses mesures d’une importance variable, les parties prenantes de l’organisation sont familiarisées avec les nouvelles valeurs. Il arrive parfois qu’il faille se séparer de certains acteurs pour que le processus de changement puisse être réalisée avec succès.

De nombreux éléments d’un tel processus de changement s’appliquent tout autant dans la gestion locale. Cependant, leur application et leur mise en œuvre est bien plus complexe. Il est difficile de se séparer des entreprises locales qui ne s’identifient pas suffisamment avec les nouvelles valeurs (de la marque). Il n’est pas possible de simplement congédier les citoyen(ne)s qui ne peuvent et ne veulent que difficilement représenter les valeurs d’une nouvelle marque régionale.

Le développement local et la gestion du changement en tant que missions de la gestion locale
À présent, c’est le marketeur local qui entre de nouveau en jeu. Comme son nom l’indique, le marketeur commercialise la région. Mais est-ce qu’il peut/doit jouer le rôle d’un gestionnaire local et des changements? Est-il habilité à assumer cette responsabilité et possède-t-il les connaissances pour intervenir dans ce «système» complexe et naturellement inerte d’une région? Est-il capable d’initier des changements dans l’environnement social et économique? Et est-il en mesure de transformer une région conservatrice en un site innovant, ouvert et libéral? Et de surcroît, sans dépasser les délais utiles?

En règle générale, ce n’est pas possible car les quatre modèles de la gestion locale (voir illustration) peuvent difficilement être assumés par une seule personne. La gestion locale est une tâche complexe. Il importe d’en tenir compte lors du développement d’une (nouvelle) marque. Des valeurs qui existent depuis plusieurs décennies ne peuvent pas être simplement anéanties en un clin d’œil. De ce fait, une nouvelle marque devrait plutôt miser sur les valeurs existantes pour son développement. Dans le cas contraire, l’environnement local doit être habitué progressivement aux valeurs d’une nouvelle marque.

Il est discutable de savoir si cette mission peut ou doit être assumée par le marketeur local. Et pourtant, il est impératif que la répartition des rôles soit respectée afin d’assurer le bon fonctionnement d’une marque en fin de journée, et qu’elle soit compatible avec les valeurs fondamentales locales. ■

À propos de SVSM

L’association suisse pour la gestion locale SVSM (Schweizerische Vereinigung für Standortmanagement) a été créée en 1998. Les échanges d’informations et de connaissances interdisciplinaires et la mise en réseau constituent les objectifs prioritaires de l’association commerciale. La SVSM compte présentement plus de 80 membres provenant des secteurs du développement local et économique, de l’aménagement territorial, de l’immobilier, de l’enseignement et des formations professionnelles. La SVSM organise chaque année la «Journée de la gestion locale» avec des intervenants de renom et un espace dédié à la mise en réseau. Par ailleurs, la SVSM organise chaque année les «SVSM Awards» pour des projets remarquables du domaine de la gestion locale, et elle décerne le prix du «Gestionnaire local de l’année».

www.svsm-standortmanagement.ch

 

 

 

Plus d'articles