Entre stabilité, protection du logement et pression de la croissance
Le secteur immobilier bâlois est confronté à un paradoxe. Les fondamentaux économiques sont stables, la demande est forte et, en théorie, il y aurait suffisamment de terrains disponibles. Pourtant, des réglementations strictes et la lenteur des processus freinent la production de nouveaux logements. Un état d'esprit issu de la table ronde qui se tient actuellement à Bâle.
Ambiance actuelle du secteur immobilier bâlois
La situation de départ est ambivalente. D’une part, Bâle jouit d’une grande stabilité économique et d’une base solide dans l’économie réelle, comme le confirment les analyses de marché actuelles. D’autre part, la production de logements à proprement parler est en difficulté. En comparaison internationale, par exemple avec Paris, San Francisco ou Londres, le coût du logement est certes encore modéré par rapport aux salaires à Bâle. Mais l’ambiance est morose. La production de logements ne se porte pas bien. Ce n’est pas tant le manque d’investisseurs qui est en cause, mais plutôt la complexité des processus de planification et les obstacles que l’on rencontre chez soi.
Défi de la protection du logement
L’un des thèmes centraux du débat est la « protection du logement » bâloise. Cette loi, conçue à l’origine pour garantir la compatibilité sociale des rénovations et protéger les locataires, s’avère être un frein à l’investissement dans la pratique.
Les critiques portent sur le fait que la protection du logement part d’une bonne intention, mais qu’elle réduit en fait l’offre. Si les rénovations sont rendues non rentables par des exigences excessives, elles n’ont tout simplement pas lieu. Certes, des adaptations ont déjà été apportées au règlement, par exemple pour faciliter les rénovations énergétiques, mais l’incertitude demeure. Il y a moins de nouveaux logements sur le marché, alors que l’immigration se poursuit. Cela aggrave précisément la pénurie que l’on voulait combattre. Aujourd’hui, les personnes qui cherchent un logement, que ce soit pour des raisons familiales, un changement d’emploi ou un déménagement, se heurtent à un marché asséché et à des prix élevés. La réglementation protège donc le parc immobilier existant, mais pénalise ceux qui souhaitent entrer sur le marché.
Leçons à tirer pour les autres cantons
En regardant au-delà des frontières, on constate que Bâle sert actuellement plus d’avertissement que de modèle en matière de réglementation. L’introduction de dispositions de protection strictes rappelle les erreurs du passé (politique de taux d’intérêt et de réglementation il y a 40 ans). La leçon à tirer pour les autres cantons est donc qu’il ne faut pas restreindre artificiellement l’offre lorsque celle-ci augmente.
Un autre phénomène est le changement d’affectation des bureaux. Ce qui était difficilement envisageable il y a quatre ans en raison des attentes en matière de rendement devient soudainement attrayant en raison de la hausse des taux d’intérêt et de l’évolution des marchés des bureaux. Mais ces transformations ne créent généralement pas de logements à bas prix, mais plutôt des offres à prix élevés.
Bâle dans la Suisse des 10 millions
La Suisse s’agrandit et Bâle suit le mouvement. La ville dispose d’un énorme potentiel grâce à d’anciens sites industriels (par exemple Klybeck Plus) et à des zones de transformation. Les investisseurs seraient prêts à développer et à densifier ces zones. Mais le problème est la durée. Les processus de planification, comme celui du site de Klybeck, s’étendent sur 5 à 6 ans avant que la moindre construction ne soit possible.
Pour une Suisse de 10 millions d’habitants, la densification vers l’intérieur n’a pas d’alternative. Des compromis doivent être trouvés, comme dans le cas de l’initiative « Cardinaux du climat ». Les terrains de plus de 30 000 m² doivent pouvoir être construits de manière plus dense, mais doivent en contrepartie répondre à des critères écologiques et sociaux stricts. Il est important de comprendre les investisseurs, en particulier les fonds de pension. Celles-ci gèrent des fonds fiduciaires pour la prévoyance vieillesse et ne peuvent pas simplement subventionner le logement de manière croisée. La sécurité de la planification est ici la monnaie la plus forte.
Avenir et solutions
Quel est l’avenir ? Le secteur demande avant tout une accélération et une flexibilité. Comme en Allemagne, nous devrions discuter du turbo de la planification et il faudrait des mécanismes permettant de raccourcir drastiquement les procédures d’autorisation. L’immobilier du futur doit être flexible. Ce qui est aujourd’hui un bureau doit pouvoir être demain un appartement et après-demain peut-être à nouveau un bureau ou un espace logistique. Les monostructures fragmentées ne sont plus d’actualité. La peur de la croissance doit faire place à une volonté d’aménagement. La qualité résulte d’une bonne densification interne et d’une mixité des usages, pas de l’immobilisme.
Les moyens et le capital seraient disponibles pour atténuer la pénurie de logements à Bâle. Ce qui manque, c’est un environnement réglementaire qui permette les investissements au lieu de les décourager et un processus de planification qui suive le rythme des changements sociaux.